L'affaire Kovac - Howard Fast - l'arbre vengeur - les-carnets-dystopiques.fr
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L’affaire Kovac et autres nouvelles

L’affaire Kovac est un ensemble de 4 nouvelles de l’auteur américain Howard Fast. Le récit-titre est accompagné de 3 autres textes issus du recueil originel « The Edge of Tomorrow » datant de 1961.  Cette nouvelle sélection a été publiée en avril 2023 aux éditions de l’arbre vengeur.
Voici un court ouvrage qui semble contenir toute l’essence de la littérature d’anticipation et qui pose la question de l’humanité du futur : de quoi sommes-nous capables, en bien comme en mal, et qu’est-ce que le futur nous réserve ?
Ou bien peut-être : que réservons-nous au futur ?

🧊« L’affaire Kovac et autres nouvelles » – Howard Fast – L’arbre vengeur – 8,50€

Une chronique imprudente rédigée par Julien Amic

 

Un extrait de « L’affaire Kovac » …

 

« Et au bout de ces vingt-neuf années, notre terre n’était plus qu’un seul complexe de production consacré au progrès et au bonheur, si je peux m’exprimer ainsi, de l’humanité tout entière. […] L’ère de la raison commençait, l’ère de la production pour le bien de tous, la production pour la vie, sous le code unique de l’Homme. »

 

 

Teaser : « L’affaire Kovac »

Un teaser pour vous donner envie…

(Si vous souhaitez en savoir le moins possible sur le livre, lisez seulement cette partie)

 

S’il devait exister une possibilité que l’humanité s’oriente vers des lendemains lumineux et verdoyants, emplis de justice, de paix, de liberté, et libérée de tous les travers qu’elle n’a cessé de dévoiler tout au long de son histoire… comment pourrait-on y parvenir ?

L’avenir nous réserve peut-être un bonheur incommensurable. Mais peut-être aussi une annihilation totale. Peut-être sommes-nous incapables de faire évoluer notre espèce au-delà d’un certain point. Incapables de dépasser notre individualisme, notre sauvagerie, nos carcans intellectuels et nos dogmes inutiles, nous sommes mus par le profit, l’élitisme, la volonté de domination et l’esprit belliqueux.

Si la réussite outrancière des plus puissants industriels de ce monde peut nous apprendre quelque chose, c’est sans doute que le bien et le mal sont interdépendants. Le manichéisme, ça n’existe pas, et nous sommes bien peu de choses… n’est-ce pas M. Kovac ?

« – Je peux acheter n’importe quoi. Ce n’est qu’une question de prix.
– Pouvez-vous acheter l’avenir ? lui demandai-je. »

(La suite, sans révéler l’intrigue ni le dénouement, dévoile certaines parties du récit. Pour lire seulement l’analyse vous pouvez vous rendre directement ici )

 

Demain les humains …

L’histoire en profondeur, mais sans tout dévoiler

 

« L’affaire Kovac » est un problème soulevé à chaque réunion par le Président du Conseil des directeurs. M. Steve Kovac fut le plus important homme d’affaire de la terre. Il s’était mis en tête de tout acheter, tout posséder, tout contrôler. Son argent lui permit même d’acquérir le futur, d’une certaine manière. C’est en tous les cas ce qu’il tenta de faire le jour ou il tomba gravement malade. Et cela eu des conséquences pour le moins inattendues, orientant l’ensemble de l’humanité vers un société plus juste, durablement pacifiée. Mais… Et Kovac dans tout çà ?

« Les premiers hommes« , quels sont-ils ? Ceux du passé ? Ceux du futur ? Peut-être que le potentiel intellectuel des êtres humains, pour se révéler pleinement, nécessite une mise en conditions particulière. Mais alors, qu’adviendrait-il de nous si nous atteignions ces fameux 100% de nos facultés mentales… Howard Fast aborde ici, au tout début des années 60, le thème de la SF post-humaniste.

« La fourmi géante » que M. Morgan a découvert sur son lit, dans cette cabane de pêche des Adirondacks, a suscité en lui une telle répulsion qu’il l’a tuée sur le champ. Mais qu’est-ce qui l’a poussé à agir ainsi alors qu’elle ne le mettait pas particulièrement en danger ? La fourmi géante serait-elle un révélateur de la nature humaine profonde… et des conséquences désastreuses que cela peut avoir sur l’avenir de l’humanité…

« Caton le Martien« , c’est le surnom que M. Erdig a donné à celui qui veut détruire la terre. Car l’espèce humaine représente selon celui-ci un danger pour les martiens. Les terriens sont obsédés par la guerre et la destruction, ils ont inventé la bombe atomique, et des fusées pour explorer l’espace. Bientôt ils s’en prendront à Mars et à ses habitants. Terra esse delendam !

« Patriotism is the last refuge of a scoundrel »
(Samuel Johnson, 1775)

 

Les lendemains qui chantent (faux)

« L’affaire Kovac et autres nouvelles » décortiqué

 

« L’homme est incapable de devenir un homme par ses seuls moyens ; il est le résultat des autres hommes, de la totalité de l’expérience humaine.« 

Howard Fast (1914-2003) a beaucoup écrit entre les années 30 et les années 90. Des romans policiers, des romans historiques – sa version romancée de Spartacus fut celle que Stanley Kubrick adapta au cinéma avec Kirk Douglas dans le rôle éponyme – et quelques récits autobiographiques.
Mais nous autres amateurs de science-fiction le connaissons surtout pour son unique recueil de nouvelles SF intitulé « The Edge of Tomorrow », publié en 1961 aux États-Unis, puis traduit dans la foulée en français pour paraître dans la prestigieuse bibliothèque Marabout en 1962 sous le titre « Au seuil du futur ».

Au seuil du futur - Howard Fast - bibliothèque Marabout - les-carnets-dystopiques.fr
Au seuil du futur

Des 7 nouvelles du recueil originel, l’arbre vengeur a choisi de n’en conserver que 4, ce qui a abouti à un livre de poche au format moderne (c’est à dire qu’il peut aisément tenir dans la poche revolver de votre jean slim, aussi appelée « poche de fesse »…). Joie que de découvrir cette collection de petits volumes que l’arbre vengeur a facétieusement nommée… l’arbuste véhément !!!

« L’affaire Kovac » est donc le récit phare, celui qui donne son titre à cette réédition partielle. Il faut dire que les thèmes abordés sont tout à fait actuels. Il y est question d’un milliardaire, un industriel de premier plan qui a fait fortune dans à peu près tous les domaines technologiques (et autres). Ce Steve Kovac/Elon Musk est une incarnation de l’hubris capitaliste qu‘Howard Fast ne goûtait que modérément. Communiste convaincu, d’inspiration Marxiste, l’auteur reçut d’ailleurs en 1953 le Prix Staline international pour la paix (si si si ! Le prix Staline pour la paix…) suite à son opposition militante à la guerre de Corée.
Ledit Kovac, atteint ici par un cancer incurable, utilise son incommensurable fortune pour s’acheter un futur, en se faisant cryogéniser dans l’attente d’un traitement. Mais la dystopie capitaliste se meut alors en utopie socialiste… Je n’en dirai pas plus. Disons simplement que l’utopie selon Fast n’a rien de manichéen.

« Les premiers hommes », c’est un thème récurrent de la SF : le fameux « l’homme n’utilise que 10% de ses capacités mentales« , citation bien souvent fallacieusement attribuée à Albert Einstein. Ce mythe populaire reprit maintes et maintes fois (et pas toujours de manière glorieuse…) en littérature et au cinéma sert ici une réflexion de l’auteur qui est la suivante : sommes nous le produit intellectuel de la société qui nous éduque ? Si je suis élevé par un loup, je me comporte comme un loup (réflexion basée sur les nombreux cas plus ou moins bien documentés d’enfants dits « sauvages »).

« Il est très bien bâti, très grand, excessivement robuste ; il ne présente aucune trace de lésion crânienne. Mais[…] il est – d’après nos critères – un idiot et un imbécile.
C’est à dire qu’il est un babouin. »

Dans ce cas mon comportement serait donc influencé par le modèle social dans lequel j’ai évolué (vous visualisez Christophe Lambert dans le film Greystoke ?). Mais si j’inverse le raisonnement, et que je fais évoluer un enfant dans un milieu « parfait », est-ce que j’obtiens un être humain parfait ?
On ne peut pas accuser ici Howard Fast d’idéaliser une certaine forme d’eugénisme. En réalité, il pose la question de la possibilité de dépasser les carcans éducationnels et moraux dans lesquels l’humanité a tendance à s’enfermer, à grands coups de dogmes, de puritanisme et règles morales absurdes.

« Si nous entreprenons de créer l’homme, nous devons le faire en toute humilité. »

Quant à « La fourmi géante » et « Caton le Martien », ce sont deux récits qui déplacent le point de vue que l’on peut porter sur nous-mêmes en tant qu’espèce intelligente. Ces deux courtes histoires questionnent notre capacité de destruction pour la première, et notre capacité d’autodestruction pour la seconde.
La fourmi géante est un texte qui tente de résoudre le mystère que constitue la violence intraspécifique du point de vue d’une intelligence collective. À moins qu’il ne s’agisse de suggérer de manière imagée le mystère des inégalités sociales d’une société capitaliste du point de vue du socialisme marxiste ?

« L’idée du bien et du mal, ce que nous appelons la moralité ou l’éthique, est une fonction de l’intelligence et, sans conteste, le plus grand mal serait la destruction de l’intelligence consciente. C’est pourquoi, il y a bien longtemps, nous avons au moins admis le commandement « Tu ne tueras point », bien que nous ne l’ayons jamais suivi que du bout des lèvres. Mais pour une intelligence collective, comme celle dont cette chose pourrait faire partie, le concept du meurtre serait si monstrueux qu’il en deviendrait inimaginable. »

Quant à Caton, c’est une allégorie de la guerre atomique qui menace. Caton le Martien, c’est un surnom faisant référence à Caton l’Ancien, homme politique de la Rome antique qui milita jadis pour la destruction de Carthage. La Terre a les moyens de détruire Mars, pense-t-il. Aussi a-t-il l’intention de prendre les devants. Il harangue le Conseil planétaire pour convaincre celui-ci d’entamer les hostilités. Ou comment la guerre froide entre Mars la rouge et Terre la bleue pourrait conduire à l’holocauste nucléaire…

« L’affaire Kovac » est une intéressante version écourtée du recueil de nouvelles « Au seuil du futur » de Howard Fast, qui posait en 1961 des questions fondamentales sur ce qui fait l’essence de l’humanité. Cupidité, soif de pouvoir, xénophobie, tendance à la violence et course aux armements… Si certains récits posent un regard acerbe sur les pires travers de notre espèce, Howard Fast semblait tout de même penser qu’un avenir utopique était envisageable… Mais que cela demanderait de menus sacrifices, une bonne dose de chance et… beaucoup d’intelligence !
À l’heure ou cette dernière a une fâcheuse tendance à devenir artificielle, il faut peut-être vite relire Fast …

« La fin des guerres, de la haine, de la faim, de la maladie et de la mort : n’est-ce pas le rêve éternel de l’homme ? »

 

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L’affaire Kovac et autres nouvelles

Auteur : Howard Fast
Editeur : l’arbre vengeur
Collection : l’arbuste véhément
Format : 12×18
ISBN : 978-2379412202
100 pages
Parution : 2023 (avril)
Tiré du recueil original : The Edge of Tomorrow
Parution originale : 1961
Pays : États-Unis

Traduction : Gérard Colson
Couverture : Nicolas Étienne
Chroniqueur : Julien Amic

 

🧊« L’affaire Kovac et autres nouvelles » – Howard Fast – L’arbre vengeur – 8,50€

 

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Une chronique imprudente rédigée par Julien Amic

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2 pensées sur “L’affaire Kovac – Howard Fast”

  1. Salut Julien et félicitations

    Il y a des hasards ou pas, comment expliquer qu’un de nos adhérents, sais plus son prénom, nous a fait part de sa lecture du moment , comme de coutume aux »fictionautes » de la médiathèque de Quimper, tu connais… Un vieux Marabout des 70’s d’un auteur….obscur en sf mais que je connaissais en polar et scénariste(spartacus) à la vie tumultueuse (mc carthysme) …..Howard Fast et de nous parler des nouvelles de ce recueil…un peu plus que chez l’arbre vengeur…et le bouquin de faire le tour pour aboutir au fond bibli de l’association.
    Que dire de cette situation?

    1. Comme tu vois, le « vieux marabout » en question est aussi dans ma bibliothèque, et je l’ai mis en photo ! C’est l’un des premiers ouvrages SF que j’ai lu. L’une des nouvelles (« du temps et des chats » je crois) figure également dans le recueil « Les 20 meilleurs récits de science-fiction », également chez Marabout, et qui constitue ma Bible de chevet depuis l’année de mes 11 ans… Ce recueil de l’arbre vengeur est une vraie occasion de se pencher sur Howard Fast !
      Pour le reste, la convergence de pensée susmentionnée est probablement due à une distorsion de l’espace temps. Mais ce n’est que mon avis.

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