Les esclaves du Vert - Frank herbert - folio - Julien Amic - les-carnets-dystopiques.fr
Les esclaves du Vert - Frank Herbert - Gallimard - les-carnets-dystopiques.fr
Les esclaves du Vert

Les esclaves du vert et autres nouvelles est un ensemble de 3 textes de l’auteur américain Frank Herbert. Ces récits sont une courte sélection issue de l’anthologie Nouvelles, I et Nouvelles, II publiées par ailleurs chez Folio SF (n°721 et 722). Cette micro-anthologie a été publiée en septembre 2023 aux éditions Gallimard / Folio 2€/3€.
Cet ouvrage très court permet de se faire un rapide aperçu de ce que Frank Herbert a pu produire… en dehors de Dune !
Mais qui sont les esclaves du Vert ?

🐝« Les esclaves du Vert et autres nouvelles » – Frank Herbert – folio – 3€

Une chronique imprudente rédigée par Julien Amic

 

 

Un extrait de « Les esclaves du Vert » …

 

« La pensée unificatrice lui conférait un air de servilité qui lui faisait un bouclier contre les regards insistants des humains alentour. Ceux de sa race avaient appris à connaître nombre d’attitudes traditionnelles de l’humanité ; ils avaient compris très tôt que la servilité était une forme de dissimulation. »

 

 

Teaser : « Les esclaves du Vert »

Un teaser pour vous donner envie…

(Si vous souhaitez en savoir le moins possible sur le livre, lisez seulement cette partie)

 

Maîtriser le vivant est un vieux rêve de l’humanité, aussi vieux qu’elle-même. Alors pourquoi ne pas améliorer cette planète que nous habitons ? Pourquoi ne pas améliorer le vivant, en manipulant génétiquement le monde animal, les insectes par exemple, et en supprimant de la surface des terres cultivables et exploitables les animaux nuisibles, ceux qui ne sont pas utiles au développement de notre supérieure humanité ?

Mais peut-être ne sommes-nous pas tout-puissants ? Peut-être les insectes en voie d’éradication ont-ils la capacité de tenir tête à notre volonté dévastatrice…

Et s’ils avaient trouvé un moyen ? Un moyen de résister, sous la plus incroyable des formes, et de la plus déroutante des manières ?

« Nous sommes les esclaves verts au service du Grand Tout »

(La suite, sans révéler l’intrigue ni le dénouement, dévoile certaines parties du récit. Pour lire seulement l’analyse vous pouvez vous rendre directement ici )

 

Triptyque herbertien …

Les 3 histoires en profondeur, mais sans tout dévoiler

 

  • « Les esclaves du Vert »De qui sommes-nous les maîtres ? Ici au Brésil on a décidé, à l’instar de la Chine il y a peu, de contrôler la population d’insectes nuisibles. Il est entendu que tout ce qui n’est pas utile à l’homme en tant que cultivateur et exploitant est nécessairement nuisible et doit être exterminé. Les bandeirantes y veillent avec une attention zélée. Petit à petit la zone Rouge recule au profit du Vert, garanti sans parasites ! Mais il y a des esprits dissidents, qui commencent à comprendre que peut-être, cette politique agricole novatrice n’est pas si prometteuse et efficace qu’elle en a l’air. Et puis il y a les insectes. Eux aussi sont dissidents. Leur rebellion se fera par la violence… de leur intelligence !

 

  • Dans la nature existe une curieuse entité que l’on nommera Siukurnin. Et voilà qu’après une longue attente elle perçoit enfin la présence de vibrations non chilitighiennes… celles d’un groupe humain, des chasseurs. Il va lui falloir entrer en contact avec l’un d’entre eux pour lui expliquer ce que sont « L’oeuf et les cendres ». Comme il est étrange que le merveilleux absolu de l’existence chilitighienne soit perçu par cet humain de manière si… terrifiante !

 

  • Une « Rencontre dans un coin perdu » est parfois l’occasion de faire d’étonnantes découvertes. Notamment lorsqu’un homme vous aborde avec cette curieuse question : « Vous vous intéressez à la perception extra-sensorielle, hein ?« . C’est l’histoire d’une qualité innée trop exceptionnelle pour être utile. Mais c’est bientôt l’heure d’un évènement étonnant qui déterminera si, en fin de compte, cette qualité peut s’avérer éminemment bénéfique ou bien… irrémédiablement absurde !

« Vous ne pouvez rien faire contre l’inéluctable »

 

Le grand maître était vert

« Les esclaves du Vert et autres nouvelles » décortiqués

 

« Seules les espèces utiles méritent de vivre ! »

Frank Herbert (1920 – 1986) est principalement connu pour deux choses. La première, c’est qu’il est l’auteur du livre-univers Dune (noooon c’est pas vrai ? Hé si) dont la communauté d’amateurs n’a rien à envier à celle de Tolkien. La deuxième, c’est qu’il est l’un des grands (et des premiers) représentants de la science-fiction écologiste. Dune en effet est un roman qui laisse la part belle à l’écologie (celle de la planète Arrakis et des ses habitants / colons / exploitants / protecteurs…) et en cela son auteur est souvent qualifié de précurseur dans le domaine (on parle ici d’écologie écosystémique, plus que d’un « retour à la terre », thème récurrent de la SF post Deuxième Guerre Mondiale).

Mais ledit écrivain a aussi rédigé d’autres textes et parmi ceux-ci il y eut de nombreuses nouvelles. Quarante d’entre-elles, écrites entre 1952 et 1979, on été regroupées au sein du double recueil sobrement(s) intitulé(s) Nouvelles, I et Nouvelles, II publié(s) chez Folio SF en février 2023. Gallimard (dont folio SF est une collection) en a choisi 3 pour tenter ceux qui auraient encore des doutes quant à l’intérêt de la double anthologie susmentionnée !

Alors pour parler – essentiellement – de la nouvelle « Les esclaves du Vert » (Greenslaves – 1965), elle est historiquement passionnante en ce sens qu’elle tire très tôt la sonnette d’alarme face aux dangers de l’ingénierie agricole des organismes génétiquement modifiés, et de l’agriculture intensive. En effet, si cette dernière se développe historiquement au début des années 60, le premier OGM ne verra le jour qu’en 1973. Frank Herbert écrit ici un récit d’anticipation qu’il est passionnant de lire presque soixante ans plus tard. Il y développe le concept même d’écosystème et de biosphère avec des passages d’une clairvoyance déconcertante.

« Plus la serre contient de formes de vie et plus la vie sous toutes ses formes est protégée. La serre triomphante doit être le lieu de la vie diversifiée au plus haut point. La vie en profusion est la vie florissante. »

Ce principe d’une humanité faisant partie intégrante de la nature mais qui n’est pas capable de le comprendre, Frank Herbert le pousse à l’extrême. Mais pour lui c’est la société humaine en tant qu’entité qui semble aveugle, et ce n’est pas forcément le cas de l’être humain en tant qu’individu, du moins pas intrinsèquement. Certaines personnes semblent percevoir que le fait de vouloir dominer et soumettre la nature est une erreur. Mais ceux-là n’ont pas le pouvoir de changer les choses alors, ce sont les animaux les plus maltraités, dans cette pauvre forêt amazonienne bolsonariste (ah non pardon on est en 1965 et le Brésil est alors une dictature…), qui vont expliquer gentiment (ou pas) à leurs exterminateurs pourquoi détruire la vie est contreproductif…

« Grâce aux abeilles mutées, on remplirait toutes les cases de l’écologie des insectes. »

L’ensemble des trois récits, il faut tout de même que je le précise, mettra parfois à rude épreuve la suspension d’incrédulité du lecteur peu familier de Frank Herbert. La science en effet, si elle est (à peine) évoquée dans Les esclaves du Vert, n’est pas la caractéristique principale des écrits de l’auteur. Ainsi le stratagème des insectes des esclaves du Vert est-il poétique plus qu’il n’est scientifique. L’Oeuf et les cendres relève davantage du fantastique horrifique et n’aurait sans doute pas déplu à Algernon Balckwod alors que Rencontre dans un coin perdu aurait pu être écrit par un Robert W. Chambers qui aurait eu de l’humour…
Mais c’est bien là la force de Frank Herbert : produire des récits qui ont quelque chose de merveilleux et d’onirique (ou de cauchemardesque), qui délivrent un message souvent très sérieux, et qui sont portés par une histoire qui débride avec efficience notre imagination engourdie.

« Les esclaves du Vert et autres nouvelles » forment une intéressante micro-anthologie de Frank Herbert. La nouvelle éponyme questionne en 1965 – avec une pertinence avant-gardiste – les errements d’une humanité dont l’hubris s’enthousiasme des possibilités productivistes de l’agriculture intensive et de la maîtrise génétique du vivant. L’ensemble des trois textes donne à voir une facette moins connue de l’auteur de Dune et suscitera chez vous, je n’en doute pas, l’incoercible envie de vous procurer fissa les deux volumes de l’anthologie dont ils sont extraits. Bon, je dois vous laisser, la librairie va fermer…

« Si la chaîne est brisée, la nature entière est condamnée. »

 

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Les esclaves du Vert - Frank Herbert - Gallimard - les-carnets-dystopiques.fr
Les esclaves du Vert

Auteur : Frank Herbert
Editeur : Gallimard
Collection : folio 2€/3€
Format : 10×18
ISBN : 978-2073015914
112 pages
Parution : 2023 (septembre)
Titres des recueils complets : Nouvelles I et II (Folio SF 721 et 722)
Parution originale : 1960, 1965, 1973
Pays : États-Unis

Traduction : Pierre-Paul Durastanti (révision), Dominique Haas, Jacqueline Huet
Chroniqueur : Julien Amic

 

🧊« Les esclaves du Vert et autres nouvelles » – Frank Herbert – folio – 3€

 

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Une chronique imprudente rédigée par Julien Amic

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Une pensée sur “Les esclaves du Vert et autres nouvelles – Frank Herbert”

  1. J’ai du lire il y a maintenant quelques mois la première nouvelle qui se passe au Brésil, « les esclaves du vert » la révolte de ces insectes « nuisibles »,aux pouvoirs de composer un être humain pour expliquer en leurs termes quelque peu virulents et violents aux « bandeirentes » ce qu’est l »écologie.

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